René Coromines
Témoignage de Denis Estève, membre fondateur de l’AMVIC
René Coromines : sa bonne humeur, sa gentillesse, un militant modeste mais dont l’action sans faille au service de la CGT et des salariés, doit être un exemple pour toutes et tous.
Le Télégraphe
Francis Mitrano nous livre ses souvenirs du Télégraphe
(membre de l’AMVIC)
Mai 68 à Colbert
LA GRÈVE DE MAI-JUIN 1968 AU CENTRAL TÉLÉPHONIQUE INTER URBAIN DE MARSEILLE COLBERT
par Claude Navarro (membre de l’ AMVIC)
À cette époque, le central téléphonique inter urbain occupait une partie du 2eme étage de l‘Immeuble Colbert.
Paul Codaccioni
Hubert KODAK dans la Résistance
Né le 23 novembre 1888 à Bonifacio (Corse), fusillé le 18 juillet 1944 à Signes (Var) ; contrôleur principal des PTT ; syndicaliste CGT ; résistant, membre des Mouvements unis de la Résistance (MUR), chef régional de la Résistance PTT.
Les demoiselles du Téléphone

Je décroche, je clique deux fois vers la droite sur la languette : « bonjour mademoiselle, je voudrais le 9 à Montmaur, dans les hautes alpes ». Tout de suite, monsieur, il y a dix minutes d’attente …Merci « .Le 9, c’est le numéro du menuisier du village. Il y a quatorze abonnés au téléphone à Montmaur sur 397 habitants en cette année 1950.
Bien que le téléphone existe depuis fort longtemps, son développement sur le territoire a pris plusieurs années. En 1948, un million huit cents milles habitants possédaient le téléphone, sur une population de 42 millions. Une goutte d’eau dans un océan ! Des privilégiés, comme on les appelait à l’époque.
Au fil des ans, cet outil de communication est devenu indispensable. Il a fallu alors s’adapter, créer des infrastructures, des centraux téléphoniques, des emplois pour ces téléphones qui n’étaient pas automatiques. C’est la montée en puissance des services que l’on va appeler « l’interurbain « . De grandes salles, de grands appareils, et les petites mains de ces demoiselles pour faire fonctionner tout cela.

A Colbert, elles étaient 25. On ne les connaissait pas, ne voyait jamais leur visage …pour nous, elles n’avaient pas de prénom. Juste une voix. 24 heures sur 24, 365 jours par an, dans ces grandes salles où stagnait un bruit de fond incessant, c’était la course aux appels. Dès qu’un voyant s’allumait sur leur « meuble » (keyboard pour les puristes !), elles plantaient la fiche pour répondre et passer le numéro demandé.
Et cela s’enchaînait à une vitesse folle ! Elles avaient des objectifs, une moyenne de communications à passer intenable (30 appels à l’heure voire plus). Une discipline de fer : une surveillante pour dix demoiselles se chargeait de sanctionner les paroles inutiles. Et le chef, l’horrible Monsieur V, la terreur des téléphonistes Marseillaises : d’une mauvaise foi affichée, il faisait toujours scandale pour contester la durée des appels et par conséquence, le non atteint des objectifs. Une petite pause pendant la journée de travail, juste le temps de descendre au bar d’à coté prendre un café et un peu silence.
Des conditions de travail quasi identiques dans tous les centraux téléphoniques de France. Un témoignage de 90 téléphonistes est paru au début des années 2000, qui raconte le vécu quotidien de ces demoiselles « fantômes », pourtant aussi utiles que le chemin de fer ou les automobiles à cette époque.
Parmi elles, Zaza, Claude et Liliane, trois de nos demoiselles marseillaises s’expriment sur l’impact de leur vie professionnelle sur leur vie privée ; » Nos maris disaient que quand on sortait de là, on était comme des vachettes qui quittent le toril : pressées et sonnées une fois dehors «. Une allégorie charmante qui n’estompe en rien l’aménité naturelle qui les caractérises.
Coté social et revendicatif, ces dames étaient autant « teigneuses » que le sexe dominant (pardon ! mais il faut l’appeler comme ça !!!). C’est le premier service des PTT à avoir obtenu une réduction du temps de travail.
Les années passent …. Nous sommes en 1960. Gaston Defferre est maire de Marseille depuis déjà 7 ans ! Il usera sont fauteuil pendant encore 26 ans : Un record.
Dans cette décennie-là, la Poste Colbert est le phare, la vitrine, la « holding » des PTT de toute la région. Malgré ce, il y a toujours 3 ou 4 ans d’attente pour obtenir une ligne de téléphone.

Dix ans plus tard, une révolution survient : le téléphone à cadran .
Aie !!!! ça sent mauvais pour les demoiselles du téléphone. Mais les infrastructures, les réseaux, les lignes automatiques, les câbles, tout cette armada de l’évolution technologique ne suit que partiellement. Les zones urbaines sont priorisées. Il faudra donc encore faire appel aux voix chaudes des téléphonistes pour contacter le menuisier du village de Montmaur, dans les hautes alpes (le 9 …je vous rappelle). Sauf que désormais, avec les cadrans , on peut parcelliser géographiquement les appels à l’inter : le 10 pour Marseille, le 15 pour la région, le 19 pour l’international . Il y a une raison à ces retards évolutifs. Je m’écarte un peu du sujet, mais il me parait important d’en parler pour comprendre.
Jusqu’en 1946, l’électricité à tension 110 volts est distribué par une multitude d’entreprises privés en France. L’état y met fin et crée EDF, une entreprise publique. En 1956, elle décide d’établir une tension électrique à 220 volts pour tout le territoire. 2 centres de changement de tension sont créés : le premier à Marseille, le second à Melun.
L’immensité de la tache est telle qu’elle va prendre 20 ans.
Tout va s’accélérer à partir de 1973 et du premier « choc pétrolier ». L’avènement de l’électricité nucléaire va considérablement faciliter les choses. Le 220 volts sera quasiment généralisé cinq ans plus tard.
Les ingénieurs des télécommunications avaient besoins de cette augmentation de puissance pour installer les centraux téléphoniques automatique.
Le développement du téléphone est alors exponentiel.

On compte les abonnés par millions, le bon vieil annuaire se voit concurrencé par le minitel, en 1980 apparaît le téléphone à touches, en 1990 le téléphone sans fil et puis très vite, le téléphone portable. Les demoiselles du téléphone sont progressivement les victimes collatérales de la modernisation.
Leurs voix chaudes, humaines et sensibles sont aujourd’hui remplacées par des voix de synthèse, neutre, froide, au ton neutre et disgracieux. Et vous n’êtes plus autorisé à répondre :
» si votre appel concerne une réclamation, tapez 1, un litige tapez 2, un contact humain, tapez …… ».
Charles Ribard.
Colbert, la Renaissance

Nous y sommes; l’immeuble Colbert, malgré ses 130 ans, va reprendre du service grâce au travail remarquable de l’architecte Roland Carta et des différents corps de métiers. Durant 120 ans, Colbert a abrité différents services de l’administration des PTT. Le RDC était dédié aux services postaux. Il abritait les guichets accessibles par le grand hall, les services de « l’arrière » où se côtoyaient les facteurs, les trieurs, ainsi que tous les services de Marseille RP (recette principale). Aux 1er & 2 ème étage se sont succédées plusieurs centaines de personnes, affectées aux services du télégraphe, de l’interurbain, des renseignements nationaux (12) et internationaux (3212). Les derniers occupants furent ceux de la direction régionale de France Télécom devenue Orange. Puis pendant presque une décennie, Colbert demeura vide de tout occupant. Différents projets ont alors fleuri: tantôt une grande enseigne, tantôt un grand marché et j’en passe et des meilleurs et enfin, le projet de La Poste : redonner vie à ce majestueux édifice en confiant la rénovation à l’architecte Roland Carta. Pour avoir travaillé dans la partie Télécom pendant une dizaine d’années, à cheval sur les deux siècles, j’ai eu le privilège de le visiter à la fin des travaux. J’ai pu contempler la splendide réalisation qui a su garder l’âme de cet édifice, tout en le projetant dans le 21e siècle avec toute la technologie actuelle.
AMVIC s’inscrit totalement dans la mémoire vivante ,la sauvegarde de l’histoire sociale et patrimoniale de l’immeuble Colbert. Il fût le témoin de hauts faits de la résistance (Paul Codaccioni) et de nombreuses luttes victorieuses de son personnel.
Georges Raphaël